Le Tribunal de première instance (TPI) de Mamou a rendu son verdict aujourd’hui mardi 30 janvier 2018, concernant l’affaire du scandaleux massacre de deux chimpanzés, suivie de la capture d’un bébé chimpanzé dans la sous-préfecture d’Ourekaba.
Les deux trafiquants ont écopé de la peine maximale prévue par la loi, une décision obtenue grâce au soutien de GALF, partenaire du gouvernement guinéen dans la lutte contre le trafic international d’espèces animales protégées.
Après une ferme réquisition du Ministère Public qui avait requis un an d’emprisonnement ferme contre chacun des deux contrevenants lors de la dernière audience, le tribunal vient de taper fort ce mardi 30 janvier 2018. Momo Mansaré et Lancinet Kourouma ont été reconnus coupable des faits mis à leur charge, notamment les délits d’abattage de chimpanzés, capture, détention et circulation d’un bébé chimpanzé, une espèce animale intégralement protégée par le code de faune et règlementation de la chasse mais aussi par la Convention de Washington.
Ainsi, le tribunal condamne les nommés Lancinet Kourouma et Momo Mansaré à un an (1) d’emprisonnement ferme avec une amende de 100.000 GNF chacun. En termes de dommages et intérêts, les deux trafiquants sont sommés de payer une somme de 150 millions GNF à l’Etat via son Ministère de l’Environnement, des Eaux et Forêts, et 250 millions GNF au CCC, le sanctuaire de chimpanzés qui s’est également porté partie civile. Une décision qui sera sans doute largement saluée par la communauté internationale qui suivait avec une attention particulière cette affaire qui vient une fois de plus relancer le débat sur la criminalité faunique en Guinée.
Les dirigeants du projet GALF (Guinée-Application de la Loi Faunique) se disent satisfaits de cette décision : « Nous félicitons vivement les magistrats du TPI de Mamou d’avoir prononcé la peine maximale. Ces dernières années en Guinée plusieurs fois la peine maximale a été obtenue pour des cas de trafic de chimpanzés. Dans la même lignée il faut saluer aujourd’hui la Justice de Mamou qui a été forte dans cette affaire car il n’y a que la prison ferme qui dissuade cette criminalité et fait reculer le trafic de grands singes», s’est réjouie Charlotte Houpline, la directrice du projet.
Partenaire incontournable de l’Etat à travers le Ministère de l’Environnement, des Eaux et Forêts dans la lutte contre la criminalité faunique, le projet GALF, porté par l’ONG WARA Conservation Project, assiste les autorités guinéennes depuis déjà 6 ans dans ces opérations d’arrestation de trafiquants fauniques. Tout en suivant également le déferrement, le suivi des audiences jusqu’aux condamnations et l’exécution des décisions de Justice. C’est dans ce cadre justement que le projet a offert son expertise aux autorités régionales de Mamou pour diligenter la procédure et faire le suivi juridique durant le procès, appuyé par l’avocat du Ministère de l’Environnement, des Eaux et Forêts..
Cette victoire aujourd’hui est le fruit des efforts communs de l’Etat guinéen et du projet GALF car c’est une bataille sans fin. Ainsi, cette collaboration a permis de faire reculer le trafic international de chimpanzés d’une manière considérable ces dernières années. Ousmane Diallo, le premier trafiquant international arrêté en 2012 en Guinée a été le premier d’une longue liste de trafiquants interpelés et réseaux démantelés. Ce premier contrevenant faunique avait purgé la peine maximale et payé 50 millions GNF de dommages et intérêts pour avoir vendu 500 chimpanzés. Notamment, l’un des trafiquants condamnés en 2015 n’était autre que l’ancien chef de la CITES Ansoumane Doumbouya qui en complicité avec des réseaux organisés avait émis des permis frauduleux autorisant l’exportation illégale de centaine de chimpanzés.
A en croire les déclarations de la Directrice du GALF et de l’ONG WARA, bientôt la répression se fera plus dure car le code de faune et règlementation de la chasse a été révisé et les peines d’emprisonnement élevées.
ll faut noter que les prévenus Lancinet Kourouma et Momo Mansaré ont été mis aux arrêts par le Corps des Conservateurs de la Nature de la sous-préfecture d’Ourekaba, préfecture de Mamou le 20 décembre 2017. Après avoir sauvagement abattus deux chimpanzés adultes, ils ont capturé le bébé chimpanzé pour des fins de commercialisation.
Malgré la répression intense au niveau national contre le trafic de chimpanzés via les opérations du GALF et de l’Etat guinéen ces dernières années, et de larges campagnes de communication initiées dans le passé par les autorités régionales de Mamou en matière de protection des chimpanzés, le message n’avait pas été compris par les deux contrevenants. Espérons qu’avec une telle peine cette fois-ci, ils auront compris. Quant au bébé chimpanzé blessé par balles qui avait été saisi, il se rétablit peu à peu grâce aux soins prodigués par le CCC qui a joint le combat en Justice. C’est le 17ème chimpanzé, saisi suite aux opérations de répression, que le sanctuaire recueille.
Pour mémoire, la Guinée est reconnue au niveau international comme une capitale mondiale du trafic de chimpanzés, de nombreux braconniers et trafiquants majeurs guinéens travaillent ensemble pour capturer et exporter des chimpanzés. L’histoire des 130 chimpanzés et 10 gorilles exportés en Chine depuis la Guinée, représentant 3 millions de dollars de profits illégaux est une illustration de ce commerce monstrueux et cruel. Cette altération de l’image du pays au niveau international par ces activités illégales en violation flagrante de la loi nationale et des conventions internationales ratifiées par la Guinée a conduit en 2013 à la suspension de notre pays auprès de la CITES (Convention internationale sur le commerce des espèces de la faune et de la flore sauvage menacées d’extinction).
A rappeler que le commerce illégal d’espèces sauvages est un crime organisé transnational. Il occupe le 4ème rang du commerce illicite dans le monde, amassant des bénéfices d’environ 20 milliards de dollars chaque année.